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Écrivain et philosophe (1913-1960). Prix Nobel de littérature en 1957.
Une enfance algérienne
Albert Camus voit le jour un 7 novembre 1913 à Mondovi, petit village situé sur la côte orientale de l'Algérie près de la frontière tunisienne, appelé par ses habitants « le Petit Paris », connue pour sa culture du tabac et des oranges et pour ses vignes. L’Algérie est alors française et le village a été créé par des hommes et des femmes venus de Paris pour fonder une commune agricole. Le père d’Albert, Lucien, d’origine bordelaise, est ouvrier-caviste dans un domaine viticole.
En 1914, Lucien est mobilisé au corps du 1er Zouaves. Il se fait blesser mortellement assez rapidement, lors de la bataille de la Marne. Il décède après une semaine d’agonie le 11 octobre de la même année. On l’enterre au carré militaire de Saint-Brieuc, dans les Côtes-d’Armor (Bretagne), où il a auparavant été hospitalisé et soigné. A Alger, où sa veuve – Catherine Sintès, d’origine espagnole – et ses deux enfants se sont installés, la vie doit se poursuivre malgré le deuil – Camus racontera dans le posthume Le Premier Homme, au moyen de la fiction, le recueillement du fils sur la tombe de son père. Catherine effectue des ménages pour subvenir aux besoins de ses enfants, de sa mère et de l’oncle Etienne. La famille Camus habite dans le quartier populaire de Belcourt. Albert et son frère Lucien sont passionnés de football.
Ecriture et engagement : les débuts littéraires d’Albert Camus
A l’école, dès 1918, doué, Albert Camus se fait remarquer par ses instituteurs et notammentLouis Germain, qui lui fait obtenir une bourse lui permettant plus tard d’intégrer le lycée Bugeaud en 1924 et de poursuivre des études en Lettres supérieures. Son professeur de philosophie, Jean Grenier, le marque durablement. En 1930, atteint par la tuberculose, il s’installe chez l’un de ses oncles boucher. Au printemps 1932, alors qu’il fréquente par la lecture les grands auteurs de son époque, grâce à la bibliothèque fournie de son oncle, il commence à rédiger et publier des articles comme « Un nouveau Verlaine » (revue Sud).
Il épouse Simone Hié, volage et morphinomane, en juin 1934, sans se douter que cette union ne durera guère que deux années. 1935 le voit adhérer au Parti Communiste (il le quittera à l’automne 1937), adhérer au mouvement anti-fasciste « Amsterdam-Pleyel » d’Henri Barbusse et Romain Rolland, et créer la troupe Le Théâtre du Travail. Les pièces jouées par la troupe se font l’écho des convictions du futur écrivain – Le Temps du mépris, adapté de Malraux, ou encore Prométhée enchaîné d’Eschyle. Il écrit, toujours en compagnie des membres de la troupe, une pièce interdite, Révolte dans les Asturies. Le Théâtre du travail devient Théâtre de l’Equipe.
Il obtient son diplôme de philosophie en mai 1936 (« Métaphysique chrétienne et néoplatonisme. Plotin et Saint Augustin »). Sa santé fragile l’empêche de se présenter à l’agrégation, il effectue donc un certain nombre de petits boulots – vendeur, employé de préfecture, etc. 1937 est l’année où il publie son premier ouvrage : il s’agit de l’essai L’Envers et l’endroit. Pour gagner sa vie, en 1938, il devient assistant en météorologie et fonde les éditions Cafre avec Claude Fréminville.
La plume comme arme pendant la guerre
Il rejoint la rédaction de Alger Républicain (1938-1940) puis Soir républicain ; il quitte l’Algérie pour Paris où il entre comme secrétaire de la rédaction à Paris Soir en mars 1940. La santé d’Albert Camus, encore, l’empêche de s’engager dans la guerre en septembre 1939. Qu’importe, au lieu des armes, il garde la plume. En juin 1940, Paris Soir est délocalisé à Clermont-Ferrand : c’est ainsi dans cette ville qu’Albert Camus épouse, le 3 décembre, après avoir divorcé de Simone, Francine Faure, sa compagne. Licencié de Paris Soir, il retourne à Oran, dont Francine est originaire ; elle y est institutrice suppléante, lui donne des cours dans des établissements privés tout en tâchant de remonter une troupe de théâtre.
Entre résistance et premiers succès
L’état de santé pousse Camus à rentrer en France et à se réfugier à la ferme du Panelier en juillet 1942 – lui et Francine seront ainsi séparés jusqu’à la fin de l’année 1944. Pendant la guerre, il fait la connaissance de Francis Ponge, Aragon et Elsa Triolet, Sartre et Simone de Beauvoir. Camus publie en 1942 l’un de ses plus grands succès : L’Etranger. Pascal Pia, André Malraux et Jean Paulhan l’encensent et c’est le début d’une collaboration et d’une grande amitié entre Camus, Michel et Robert Gallimard. Le Mythe de Sisypheparaît en octobre 1942, suivi du Malentendu (1944) et Caligula (1945). En 1943, Camus rejoint le réseau de résistants « Combat », pour le compte duquel il écrit et renseigne.
Il devient le père des jumeaux Catherine et Jean le 5 septembre 1945.
Ecriture et succès de La Peste
« Combat » devient à la Libération un journal : Camus le codirige jusqu’en 1947. En 1946, il donne une série de conférences aux Etats-Unis et notamment à New York. En août de la même année, il parvient enfin à terminer un roman qui lui a donné du fil à retordre, auquel il pense depuis cinq ans au moins, et qu’il a commencé à rédiger en Haute-Loire : La Peste. Il dirige, la même année, sa propre collection chez Gallimard : Espoir, qui accueille Simone Weil ou encore René Char – le poète sera l’un de ses grands amis et le choix de sa maison de Lourmarin, en 1958, devra beaucoup au voisinage de Char à L’Isle-sur-la-Sorgue. Le succès public et critique advient en 1947, à la publication de La Peste. Il en est lui-même étonné. De juillet à septembre, ce sont quelques 52 000 exemplaires qui seront vendus. Ses livres – essais, pièces, recueils d’articles – et notamment L’Homme révolté (1951), continuent de paraître. L’écrivain va se prononcer sur tous les grands problèmes politiques et philosophiques de son époque, en particulier sur la situation en Algérie. En mai 1955, il entame une collaboration avec L’Express et soutient Pierre Mendès France. En janvier 1956, il exhorte, à Alger, à la trêve civile. En mai, nouveau succès immense avec La Chute. Il obtient le prix Nobel de littérature en octobre 1957. Le théâtre continuera également, pendant toutes ces années d’après-guerre, de le passionner. « Pourquoi je fais du théâtre ? (…) tout simplement parce qu’une scène de théâtre est un des lieux du monde où je suis heureux. (…) Je m’échappe par le théâtre à ce qui m’ennuie dans mon métier d’écrivain. »
Un dernier manuscrit inachevé : Le Premier Homme
Un tragique accident de voiture, le 3 janvier 1960, met un coup d’arrêt brutal à sa vie. Albert Camus quittait Lourmarin pour rejoindre Paris, en compagnie de Michel et Jeanine Gallimard. Catherine Camus, sa fille, fera paraître, en 1994, le roman qu’il préparait, Le Premier Homme, et dont on retrouva le manuscrit inachevé dans le véhicule de son dernier souffle.
Crédit photo : United Press International (domaine public).